Article de Global News
Un sans-abri est représenté à Montréal, le dimanche 12 septembre 2021. L'augmentation du nombre d'itinérances, couplée à la crise des opioïdes, a entraîné un besoin accru de services pour soutenir les plus vulnérables. Mais les habitants de plusieurs quartiers sont sérieusement préoccupés par ces services dans leur quartier et par la manière dont ils sont mis en place. Les experts estiment qu’il est essentiel de trouver une solution pour une cohabitation pacifique. Graham Hughes/La Presse Canadienne
Les défenseurs affirment que le nombre de personnes sans abri à Montréal est beaucoup plus élevé que ce que montrent les sondages.
Ils affirment que les enquêtes, également connues sous le nom de décompte des sans-abri, ne représentent qu'un instantané de la situation et tirent la sonnette d'alarme.
Des groupes demandent au gouvernement de cesser de mener des enquêtes et de commencer à investir dans les ressources.
« Je ne pense pas que ce soit très utile lorsqu'il s'agit de décider où doit aller l'argent, où investir, quels services devons-nous mettre en œuvre et développer », a déclaré Tania Charron, directrice générale d'Action Jeunesse de l'Ouest-de-l'île (AJOI) et membre fondateur de Ricochet, un refuge situé dans l'Ouest-de-l'Île.
L'appel a eu lieu lors du lancement de la 2e édition du magazine « Itinérance à Montréal : au-delà des chiffres ».
Il a été réalisé en collaboration avec 38 personnes de la communauté des sans-abri et a regroupé plus de 30 organismes et groupes coordonnés par le Réseau d'aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal (RAPSIM), un organisme représentant plus de 100 organismes communautaires qui œuvrent avec ceux qui sont sans abri.
Les groupes ont constaté que les enquêtes coûtent des millions de dollars, mais qu'elles ne documentent pas correctement l'itinérance.
Les groupes affirment que l'itinérance est impossible à quantifier car elle existe sous plusieurs formes, comme le couch surfing, et elle n'est pas toujours visible.
Ils affirment que les enquêtes n'aident pas parce que les chiffres rapportés ne sont pas exacts, ce qui conduit à des politiques qui ne fonctionneront pas et à canaliser les fonds vers de mauvaises ressources.
« Ce chiffre inexact est ensuite répété pendant des mois par les médias et les décideurs, alors qu'il faudrait plutôt écouter les experts du domaine pour avoir une idée fidèle de ce qui se passe et des besoins des communautés : ces experts sont les organismes communautaires et les gens concerné », a déclaré Annie Savage, responsable du RAPSIM.
Par exemple, Charron affirme que le dernier décompte des sans-abri révèle qu’il n’y a que trois personnes sans abri dans l’Ouest-de-l’Île.
Mais elle affirme que 80 pour cent de la clientèle de Ricochet vient de l'Ouest-de-l'Île.
« La réalité, c'est que chez Ricochet nous accueillons 35 personnes chaque soir, que nous refusons entre cinq et 10 personnes la nuit. Hier soir, nous avons accueilli 403 personnes différentes dans nos services pour des nuitées, nos services ont été utilisés plus de 11 000 fois (l'année dernière). Ce sont donc les vrais chiffres », a expliqué Charron.
Le décompte a été réalisé pour la première fois en 2018. Le ministère de la Santé et des Services sociaux du gouvernement du Québec, ainsi que la Ville de Montréal et la régie locale de la santé, le CIUSSS-du-Centre-Sud-de-l'Île-de-Montréal, ont travaillé ensemble sur l'opération à l'échelle de la ville.
Le CIUSSS a renvoyé Global News au ministère pour commentaires.
Un porte-parole de Lionel Carmant, le ministre de la Santé et des Services sociaux, a déclaré à Global News que le décompte des sans-abri était une demande de plusieurs municipalités.
«Un décompte plus fréquent était une demande importante des municipalités et nous convenons qu'il est important de quantifier le phénomène afin de le mesurer d'abord et aussi afin d'évaluer nos actions face à l'itinérance», a écrit Lambert Drainville dans un texte à Global News. « Nous sommes bien conscients qu’il s’agit d’un décompte qui ne prend en compte que les personnes en situation d’itinérance visible, mais nous pensons néanmoins qu’un tel exercice a une grande valeur. »
La Ville de Montréal reconnaît qu'il s'agit d'un outil important qui lui permet d'avoir un bon portrait de l'évolution de la situation.
« Toutefois, nous sommes conscients qu'il s'agit du portrait d'une seule soirée et qu'il ne représente que la pointe de l'iceberg de l'étendue des besoins des personnes en situation d'itinérance. Nous sommes d'accord avec les groupes communautaires qu'il est crucial de mettre en place des solutions profondes et permanentes pour faire face aux différentes crises qui rendent nos populations vulnérables, telles que la crise du logement, les surdoses et la santé mentale. Nous avons clairement exprimé nos demandes aux niveaux supérieurs à cet égard et nous offrons notre pleine collaboration pour aider à mettre en œuvre ces solutions », a déclaré la ville à Global News.
Le prochain décompte est prévu en 2024.